dimanche 12 octobre 2014

LA LIBERTÉ GUIDANT LE PEUPLE de Delacroix

La liberté guidant le peuple, Eugène Delacroix, 1830
Huile sur toile, 260 cm x 325 cm, Musée du Louvre, Paris
I. Présentation
1) Contexte
La liberté guidant le peuple est un tableau peint par Eugène Delacroix en 1830 à la suite des manifestations populaires qui ont renversé le Roi Charles X du trône de France les 27, 28 et 29 juillet 1830.
Eugène Delacroix, témoin des évènements précédents, décide de les traduire en peinture. 

2) Le courant artistique
Ce tableau s’inscrit dans le mouvement artistique du romantisme ; les peintres cherchent à faire ressortir la passion, les mouvements, les couleurs et les détails. Ce mouvement caractérise le 19eme siècle, et plus particulièrement la première moitié, jusqu’aux années 1850.

II. Description et analyse
1) Description formelle

Au premier plan du tableau, mise en évidence et éclairée par une lumière blanche, marchant sur des corps de gens morts, se trouve une fille du peuple. Elle porte des habits datant de l’Antiquité Grecque, sa poitrine est découverte. Cependant, sur sa tête, on reconnait le bonnet phrygien ; dans sa main droite, elle tient le drapeau français, dans sa main gauche, une baïonnette. A ses pieds se trouve un paysan avec un foulard sur la tête, probablement blessé. Son regard tourné vers elle renforce l’idée qu’elle est le personnage principal du tableau.
La scène se déroule à Paris : on peut en effet apercevoir à l’arrière-plan, émergeant de la fumée, les tours de la cathédrale Notre-Dame.
La troupe de manifestants est en train de franchir une barricade. En plus de la femme, on repère d’autres personnages, dont deux garçons des rues. Le premier, à droite, brandit deux pistolets en enjambant la barricade en même temps que la femme. Le deuxième est agrippé aux pavés qui ont permis de construire la barricade. Un homme avec un haut-de-forme émerge distinctement de la foule. On pourrait penser que c’est un bourgeois à cause de ses vêtements, mais son pantalon est celui d’un ouvrier. Il est suivi d’un autre ouvrier, sabre à la main.

2) Structure et couleurs du tableau


Les couleurs dans le tableau sont majoritairement chaudes. Les couleurs que l’on voit le plus sont celles du drapeau, qui ressortent d’autant plus qu’elles sont source de lumière dans le tableau.

3) Symbolique du tableau
La femme coiffée d’un bonnet phrygien évoque la Révolution Française de 1789, et, à travers son personnage, la souveraineté de la nation. Elle peut être assimilée à la Marianne française ; elle serait donc l’allégorie de la liberté dans le tableau. Elle guide en effet un peuple victorieux et courageux vers la liberté. Ce tableau devient, au fur et à mesure, un symbole pour la nation.

III. Liens
Gavroche, de Victor Hugo

«A force d'aller en avant, il parvint au point où le brouillard de la fusillade devenait transparent. Si bien que les tirailleurs de la ligne rangés et à l'affût derrière leur levée de pavés, et les tirailleurs de la banlieue massés à l'angle de la rue, se montrèrent soudainement quelque chose qui remuait dans la fumée.
   Au moment où Gavroche débarrassait de ses cartouches un sergent gisant près d'une borne, une balle frappa le cadavre.
   - Fichtre ! fit Gavroche. Voilà qu'on me tue mes morts.

   Une deuxième balle fit étinceler le pavé à côté de lui. Une troisième renversa son panier. Gavroche regarda, et vit que cela venait de la banlieue.»

Les Misérables, Victor Hugo, Cinquième partie, Livre I, Chapitre 15 «Gavroche dehors»

L'extrait ci-dessus est tiré de l'œuvre Les Misérables, écrit par Victor Hugo en 1862. Comme on peut le constater, la description de la barricade est très semblable au tableau de Delacroix. Il ne serait pas improbable de penser que Victor Hugo s'en serait inspiré pour rédiger ce chapitre. De plus, le garçon des rues devant la Liberté pourrait être Gavroche, trente ans avant sa véritable parution.

IV. Conclusion
Le tableau peint par Delacroix reçut un mauvais accueil de la part du nouveau Roi Louis-Philippe et des critiques, en partie à cause des détails très novateurs et réalistes. Delacroix a décidé de peindre le combat dans la boue et le sale, alors qu'on avait tendance à l'époque à enjoliver les combats.
Louis-Philippe finit par acheter le tableau pour 3000 francs, et le cache au Musée du Luxembourg.

Il ne faut pas confondre ce tableau avec une scène de la Révolution Française ! Même si le peintre s'en est inspiré, ce sont des évènements qui ont lieu un demi-siècle plus tard dont parle le tableau.